25 juin 2012
Quelle vie au pied des tours ?
Le projet Duo de Jean Nouvel, avec deux tours de 175 et 115 mètres de haut, est la première concrétisation du déplafonnement des hauteurs imposé par Bertrand Delanoë et Anne Hidalgo. Sa capacité à répondre aux défis de socialité et d’urbanité du futur quartier reste à démontrer.
Exposé du 29 juin au 20 août au Pavillon de l’Arsenal, le projet Duo est le vainqueur du premier concours de tours (au moins deux autres sont prévus !) pour Masséna-Bruneseau. Signé Jean Nouvel, il est fondé sur l’édification de deux tours de 175 et 115 mètres de haut, qui sont la première incarnation du déplafonnement des hauteurs d’immeubles imposé il y a deux ans par Bertrand Delanoë et sa première adjointe et adjointe à l’urbanisme, Anne Hidalgo, qui l’ont fait valider par le conseil de Paris malgré l’opposition maintes fois réaffirmée par la majorité des Parisiens. Au-delà de son esthétique originale, notamment par les questions qu’elle pose (ces tours déhanchées voire bancales soulignent-elles l’usure d’un concept, l’inadéquation de l’hyperverticalité aux défis de l’urbanité ?), le projet Duo doit encore démontrer sa capacité à contribuer à l’invention d’une nouvelle socialité dans un secteur urbain complexe.
Tout à son empressement à verrouiller contractuellement un projet d’érection de tours, pour le rendre irréversible, la mairie de Paris a en effet largement laissé en friche les débats sur les vrais enjeux de l’aménagement du futur quartier Masséna-Bruneseau : Comment créer une nouvelle centralité dans un secteur aujourd’hui situé à la périphérie de Paris comme à celle d’Ivry ? Comment établir entre les deux communes de véritables liens urbains et sociaux, qui ne sauraient se réduire à l’interconnexion des voiries ? Comment remplir les conditions indispensables à l’aménagement des centaines de logements prévus dans l’immédiate proximité du boulevard périphérique, de sa pollution et de ses nuisances sonores ? Entre autres…
Le 28 juin, plutôt que d’organiser la discussion programmée dans le cadre d’un groupe de travail du Comité de concertation de Paris rive gauche, la mairie et la Semapa se sont contentées d’une présentation au rabais aux représentants des associations et conseils de quartier. A quand une concertation réelle pour penser un vrai quartier Masséna-Bruneseau, auquel les bâtiments s’adaptent plutôt que d’imposer leur loi.
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4 décembre 2010
Extrait du compte-rendu du samedi de TamTam du 4 décembre 2010
Masséna Bruneseau – Projet modifié à la marge sur le secteur Sud face au quartier Boutroux.: jardin augmenté de 10%, dallage réduit coté voies ferrées, accessibilité des personnes à mobilité réduite. Mais les points noirs demeurent : sur-sol (dalle) 10 mètres au-dessus de l'avenue de la porte de Vitry induisant des voies d'accès très pentues, et déplafonnement des hauteurs obstruant l'horizon et créant un quartier neuf « écrasant » visuellement l'ancien. Ces modifications et celles concernant le financement de la ZAC seront présentées au Conseil de Paris début 2011.
Réactions dans le public à ces informations : nombre de participants soulignant les coûts économiques et l’empreinte énergétique de tels projets de grande hauteur.
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mars 2010
ZAC Paris rive gauche
Enquêtes publiques conjointes
secteur Masséna-Bruneseau
Projet de révision simplifié du Plan local d’urbanisme
Travaux d’investissement routier
d’un montant supérieur à 1,9 M€
10 février - 27 mars 2010
RAPPORT
AU COMMISSAIRE
ENQUÊTEUR
Association
TAM-TAM
30, avenue des Gobelins, 75013 Paris
Fax/répondeur : 01 43 37 12 79
E-mail : association.tamtam@laposte.net
www.associationtamtam.fr
Sommaire
Préambule
1. Remarques sur le projet de révision simplifiée du Plan local d’urbanisme sur le secteur Masséna-Bruneseau (ZAC Paris rive gauche, Paris 13e)
- 1.1. Insincérité de l’enquête
- 1.1.1. Le projet soumis n’est pas celui qui a été présenté aux citoyens
- 1.1.2. Les modifications du projet ne sont pas explicitées dans le dossier d’enquête - 1.2. Une concertation biaisée
- 1.3. Une relation non démontrée entre le déplafonnement et les objectifs poursuivis
- 1.4. Plusieurs contrevérités
- 1.4.1. Pas d’« espaces publics généreux » au sol
- 1.4.2. Une inadaptation du projet commercial
- 1.4.3. Des équipements publics insuffisants - 1.5. Une faible prise en compte des caractéristiques spécifiques du secteur
- 1.6. Une absence de stratégie de réduction des nuisances
- 1.7. Des menaces pour l’avenir
2. Remarques sur les travaux d’investissement routier d’un montant supérieur à 1,9 M€ sur le secteur Masséna-Bruneseau nord
- 2.1. Un défaut de propositions pour l’intégration du boulevard périphérique
- 2.2. Une carence de réflexion sur la relation de l’échangeur à son environnement
3. Conclusions et propositions
- 3.1. Pour le rejet du projet de révision simplifiée
- 3.2. Pour une adaptation concertée des travaux d’investissement routier
- 3.3. Pour une stratégie alternative d’aménagement de Masséna-Bruneseau
4. Annexes
- 4.1. Tract d’appel à une réunion publique organisée par TAM-TAM le 13 février 2008
- 4.2. Tract d’appel à une réunion publique organisée par TAM-TAM le 30 mars 2009
- 4.3. Tract d’appel à participer à l’enquête publique (février 2010)
- 4.4. Demande de prolongation de l’enquête publique (courrier du 18 février 2010)
Préambule
Le présent rapport s’inscrit dans la continuité d’un engagement de longue date de l’association TAM-TAM sur toutes les questions liées à l’opération « Paris rive gauche ». TAM-TAM s’est en effet créée en avril 1990 pour promouvoir dans les quartiers Tolbiac, Austerlitz et Masséna un aménagement convivial et écologique répondant aux attentes des habitants. L’association milite en particulier pour l’établissement de liens urbains et sociaux harmonieux entre les anciens et les nouveaux secteurs du 13e, aussi bien qu’avec Ivry, et pour la valorisation de leur proximité avec la Seine. Membre du Comité permanent de concertation de la ZAC, dont elle a contribué à obtenir la création en 1997, elle a obtenu, seule ou avec d’autres, de nombreuses inflexions du projet d’aménagement initial (voir notamment le site www.associationtamtam.fr).
Pour TAM-TAM, les deux enquêtes publiques ouvertes conjointement le 10 février portent sur deux projets relevant de deux problématiques différentes. Elles ne sont pas liées, même si les deux projets concernent l’un et l’autre le même secteur Masséna-Bruneseau :
– Le projet de révision simplifiée du Plan local d’urbanisme (PLU) sur le secteur Masséna-Bruneseau constitue la première concrétisation d’une stratégie, affirmée en 2007 par la Ville sans la moindre concertation, qui place sans la moindre argumentation solide la construction de tours au cœur de toutes les opérations urbaines en cours ou à venir aux portes de Paris (sauf Paris 18e). Cette stratégie a été conçue indépendamment des enjeux propres à ces secteurs, qui n’ont fait l’objet d’aucune évaluation concertée, et même sans envisager d’options alternatives pour répondre aux objectifs de densification urbaine affichés par la Ville.
– Le projet de « travaux d’investissement routier d’un montant supérieur à 1,9 M€ » procède d’une demande formulée de longue date par les associations membre du Comité permanent de concertation (CPC) de Paris rive gauche. Celle-ci a débouché sur leur inscription au PLU de la ZAC Paris rive gauche adopté en 1993. Toutefois, l’intégration du projet de simplification de l’échangeur du boulevard périphérique dans son environnement, et en particulier la maîtrise de ses nuisances, n’a pas fait l’objet d’une réflexion spécifique approfondie et concertée malgré l’importance des investissements annoncés.
1.1. Insincérité de l’enquête
Au premier semestre 2008, pour répondre à ses obligations de concertation préalable à l’enquête publique visant une révision du PLU en matière de niveau des hauteurs, la Ville a mené une large campagne de présentation et de promotion des orientations urbaines du projet Lion dans le cadre de réunions de « consultation » assorties d’« ateliers participatifs » aussi bien qu’au sein de groupes de travail du CPC de Paris rive gauche. Il convient de noter non seulement que les nombreuses critiques émises par les citoyens parisiens au cours de ce processus n’ont suscité aucune évolution des objectifs de déplafonnement de la Ville, mais surtout que le projet qui fonde le projet de révision du PLU n’est finalement pas celui qui a été présenté aux citoyens avec force moyens de communication. Les modifications opérées n’ont été annoncées fortuitement aux associations du CPC, et uniquement à elles, que le 10 février 2010, jour de l’ouverture de l’enquête publique. En outre, cette annonce est restée extrêmement succincte, sans précision sur la nature réelle du projet modifié. Enfin, les modifications ne sont aucunement explicitées dans le dossier d’enquête. L’enquête publique apparaît ainsi insincère.
1.1.1. Le projet soumis n’est pas celui qui a été présenté aux citoyens
Du « rapport de présentation » du projet de révision simplifiée (p. 17), il découle qu’une part essentielle du sous-secteur dit « Bruneseau-sud » devra finalement faire l’objet d’un aménagement sur dalle, les services de garage et de maintenance de la SNCF n’étant finalement pas déménagés. Formulée de manière incroyablement confuse, cette disposition est clairement en contradiction avec toutes les informations (textes, plans, explications orales) fournies et les affirmations formulées par la Ville et la Semapa au cours de l’ensemble des réunions de toute nature qu’elles ont organisé à propos de l’aménagement du secteur Masséna-Bruneseau depuis l’origine du projet et jusqu’au 10 février 2010, jour d’ouverture de l’enquête publique.
Un tel aménagement sur dalle est porteur de modifications du plan d’aménagement qui sont de nature à transformer substanciellement le sens et les impacts du déplafonnement des hauteurs réclamé par la Ville dans le cadre du projet de révision, et en particulier :
– création sous dalle d’importants volumes « de maintenance des futures rames automotrices », qui impliqueront de faire travailler de nombreux salariés de la SNCF dans des conditions sanitaires, voire de sécurité hautement contestables, sur lesquelles aucune étude ni aucune consultation se semblent avoir été conduites ;
– par le jeu d’une substitution du niveau de référence des hauteurs, celui de la dalle remplaçant celui du sol actuel ou en partie remblayé, rehaussement du niveau des nouveaux bâtiments par rapport aux bâtiments existants supérieur (+ 10 % ou plus ?) à celui annoncé jusqu’à présent. Ce rehaussement est porteur d’une modification du paysage urbain plus importante que celle qui a été initialement annoncée aux Parisiens. Il ouvre aussi la voie, pour certains appartements, à une exposition encore plus importante que celle initialement prévue aux nuisances du boulevard périphérique et de l’usine Syctom, tandis que ce rehaussement devrait aussi avoir des impacts non négligeables sur l’ensoleillement des espaces publics et des constructions, y compris dans le sous-secteur Bruneseau-nord ;
– modification du profil de la voirie, avec introduction de fortes pentes compliquant l’accès et les déplacements des personnes à mobilité réduite ;
– alourdissement du coût financier de l’aménagement ;
– conséquences sur la structure des programmes (suppression de parkings ?) et, partant, sur leur équilibre social.
Dans ce contexte, en l’absence de toute étude sérieuse et de tout projet étayé, la validation de la demande de déplafonnement des hauteurs formulée par la Ville apparaît au minimum comme prématurée.
1.1.2. Les modifications du projet ne sont pas explicitées dans le dossier d’enquête
L’insincérité de l’enquête publique est renforcée par l’absence dans le dossier d’enquête de toute explication claire sur la nature du projet finalement retenu par la Ville à Bruneseau-sud. D’une part, seules six lignes du « rapport de présentation » (p. 17) permettent de supputer la transformation profonde apportée au projet par la Ville. D’autre part, celles-ci sont d’un flou artistique et ne fournissent aucun élément sérieux sur les implications du changement : « Sur ce site dit Bruneseau-Sud les nouvelles études de shéma ferroviaire engagées en 2009 par SNCF et RFF font état d’une démolition des ateliers de maintenance des trains corail en place au profit d’un réaménagement d’ensemble du site pouvant permettre l’accueil de nouvelles installations de garage et de maintenance des futures rames automotrices. Dès lors, il s’agit de rendre les installations ferroviaires et l’urbanisation compatibles. Cette urbanisation pourrait s’organiser partiellement sur dalle, au-dessus des installations ferroviaires, les immeubles et les espaces publics à venir retrouvant le plein sol au niveau de l’avenue du Général Jean Simon et de l’avenue de la porte de Vitry. »
Au final, les citoyens n’auront eu aucun moyen, ni avant, ni au cours de l’enquête publique, de mesurer l’impact réel de la demande de déplafonnement des hauteurs formulée par la Ville sur le plan urbanistique, architectural et paysager, comme aux plans économique, social et financier.
1.2. Une concertation biaisée
Le choix de la Ville de faire de la construction de tours de bureaux d’une part, et de la construction de cités de minitours de logement (50 m, environ 15 étages) d’autre part l’alpha et l’omega de sa stratégie d’aménagement urbain à Masséna-Bruneseau et dans d’autres secteurs aux portes de Paris remonte à 2007 avec la création du « workshop » au sein du Conseil de Paris. Or, au mépris des propres prises de position du maire de Paris pendant ses campagnes électorales de 2001 et de 2008, cette stratégie du déplafonnement n’a fait l’objet d’aucune sorte de concertation, y compris au sein du CPC de Paris rive gauche, en violation de ses principes fondateurs (Charte de la concertation de 1996) et de ses règles de fonctionnement (contrat d’objectif).
La vaste consultation lancée à l’automne 2007 par la Ville elle-même, à laquelle 120 000 Parisiens ont participé, a pourtant révélé 63 % d’opposition à la construction d’immeubles de grande hauteur à Paris, mais la municipalité n’en a tenu aucun compte. Cette opposition massive s’est trouvé confirmée récemment par le sondage TNS Sofres/Logica publié le 11 mars 2010 par le quotidien Métro, qui montre que « interrogés sur la construction de tours de plus de 37 mètres dans la capitale (interdite depuis 1977), 76 % [des Franciliens] y sont opposés, 21 % favorables ».
Dans tous les cas, ni le cahier des charges des études menées dans le cadre du « workshop », ni leurs conclusions n’ont fait l’objet de la moindre concertation. Tout juste les membres du CPC de PRG ont-ils eu droit à une présentation des résultats au printemps 2008, soit plusieurs mois après qu’elles aient fait l’objet de présentations dans la presse pour nourrir une campagne de propagande à sens unique.
De même, les objectifs de la Ville en matière d’IGH et de déplafonnement des hauteurs n’ont fait l’objet d’aucune concertation, ni avant la délibération du Conseil de Paris en juillet 2008, ni après, ni dans la perspective de sa délibération de mars 2009. Seules deux réunions d ‘un « groupe de travail » du CPC de PRG ont eu lieu à l’automne 2008 et en janvier 2009, sans la participation de l’adjointe au maire de Paris chargée de l’urbanisme, et sans dimension programmatique, pour présenter l’évolution des travaux d’Yves Lion.
Il apparaît d’ailleurs clairement que les objectifs assignés à l’architecte coordinateur de Masséna-Bruneseau, Yves Lion, se sont concentrés sur la localisation et l’intégration d’immeubles de grande hauteur (IGH) et de minitours de logements de 50m dans ce secteur, indépendamment d’une véritable réflexion programmatique. Parallèlement, la concertation sur le projet Lion au sein du CPC de PRG n’a jamais porté que sur l’accompagnement par les Ateliers Lion du choix du déplafonnement réalisé par la Ville, et non sur ce choix lui-même.
Ainsi, par rapport à ceux affirmés six ans plus tôt dans le cahier des charges du concours qui a conduit à la sélection des Ateliers Lion, les objectifs de constructibilité du secteur ont été quasiment doublés par la délibération de juillet 2008 du Conseil de Paris sans réflexion sur les implications programmatiques de ce changement majeur, et toujours sans la moindre concertation. Ils sont passés d’environ 285 000 m2 à une fourchette de 400 000 à 490 000 m2.
Le 3 février 2009, dans une note propositionnelle approfondie sur Les enjeux de l’aménagement du secteur Masséna-Bruneseau (voir www.associationtamtam.fr), l’association TAM-TAM proposait notamment « que l’option d’un déplafonnement des hauteurs dans le secteur Masséna-Bruneseau ne soit éventuellement soumise au vote du Conseil de Paris qu’à l’issue d’une large concertation programmatique (…) ». Elle n’a reçu aucune réponse.
1.3. Une relation non démontrée entre le déplafonnement et les objectifs poursuivis
L’absence de concertation sur le déplafonnement intervient alors que, par ailleurs la Ville n’a à aucun moment apporté la preuve que le dépassement du plafond des 37 mètres constituait la réponse la plus adaptée à son double objectif de densification urbaine et de construction de logements, l’Association Tam-Tam ne conteste pas dans son principe. Aucune analyse n’a été produite dans ce sens. Aucune option alternative n’a été étudiée.
A l’inverse, toutes les études menées convergent pour démontrer que, en région Île-de-France, et du fait des règlements en vigueur, qu’il s’agisse des règles de prospect ou des règles de sécurité applicables aux IGH, les secteurs les plus denses sont actuellement les secteurs haussmanniens. Ce constat, rappelé il y a deux ans dans un dossier de la revue Urbanisme, aussi bien que par plusieurs intervenants aux réunions publiques organisées en 2008 et 2009 par TAM-TAM (voir annexes 4.1 et 4.2) incite, pour le moins, à la circonspection. Le déplafonnement à Masséna-Bruneseau n’est ni la seule, ni même peut-être une bonne manière de favoriser la densification de la Ville, alors qu’il présente de multiples inconvénients en matière de durabilité de la ville et de convivialité des quartiers.
En effet, quoi qu’on dise sur les « tours écologiques », toutes les études montrent que les IGH sont moins « écologiques » que les immeubles de moindre hauteur. Dans le domaine du développement durable non plus, la Ville n’a pas démontré que le déplafonnement constituait la réponse la plus adéquate pour remplir les objectifs qu’elle affiche et qui lui sont de toute façon assignés par l’évolution des prescriptions dans la construction.
1.4. Plusieurs contrevérités
Le dossier d’enquête est par ailleurs émaillé de plusieurs autres affirmations non démontrées qui entachent la demande de relèvement du plafond des hauteurs formulée par la Ville.
1.4.1. Pas d’« espaces publics généreux » au sol
Contrairement aux affirmations de la Ville, le déplafonnement envisagé n’aura pas pour contrepartie la restitution d’« espaces publics généreux » au sol. Le jardin prévu dans le sous-secteur Bruneseau-sud est de faible dimension au regard de la densité de logements prévue, augmentée par le déplafonnement. Au regard du nombre de logements programmé dans son immédiate proximité, sa superficie apparaît proportionnellement inférieure à celle des autres jardins aménagés ou prévus dans le reste de la ZAC Paris rive gauche. Sa conception est en outre oblitérée par la modification du projet qui prévoit une part importante de constructions sur dalle (cf. paragraphe 1.1.1, p.4). La faible taille de ce jardin est d’autant plus préoccupante que les jardins font cruellement défaut dans les quartiers anciens limitrophes, notamment Bédier-Boutroux.
Au nombre des « espaces généreux », on ne peut guère comptabiliser que l’esplanade prévue au débouché de l’avenue de France, dont on peut douter de la convivialité, et… les espaces laissés libres au-dessus du faisceau ferroviaire, évidemment inutilisables.
1.4.2. Une inadaptation du projet commercial
Le discours tenu sur l’implantation des commerces tient de la méthode Coué, comme cela a été le cas pendant quinze ans dans l’ensemble de la ZAC Paris rive gauche, où le bilan se révèle finalement très négatif en matière de commerces de proximité. De fait dans des quartiers à faible densité d’habitants permanents, une stratégie de saupoudrage des commerces ne permet pas de générer une véritable dynamique commerciale. Les leçons doivent en être tirés pour Masséna-Bruneseau où l’on doit envisager une double stratégie pour assurer le développement du commerce, et notamment des commerces de proximité :
– concentrer les commerces de proximité sur ou à proximité d’une ou deux artères comme le boulevard Masséna/Jean Simon ou l’avenue de la porte de Vitry, l’allée Paris-Ivry pouvant difficilement jouer ce rôle ;
– implanter au moins un secteur de commerces de bouche et de proximité (pharmacie, presse, fleuriste, services divers) à la charnière des quartiers neuf et ancien, afin de profiter d’une zone de chalandise élargie.
Cette approche trouve naturellement son sens dans le sous-secteur Bruneseau-Sud, dont la conception et le programme doivent être repensés dans un cadre plus vaste qui intègre le quartier Bédier-Boutroux, et dans une certaine mesure une partie de Patay-Masséna et l’amorce d’Ivry.
1.4.3. Des équipements publics insuffisants
En élargissant le champ, on posera aussi en des termes renouvelés les questions des équipements publics scolaires, sportifs (aucune piscine n’est prévue en dépit des besoins criants) et culturels, notoirement insuffisants pour la population prévue et si l’on prend en compte, comme cela est souhaitable, les besoins préexistants dans les quartiers voisins de Masséna-Bruneseau.
1.5. Une faible prise en compte des caractéristiques spécifiques du secteur
Erigé en axe structurant de l’urbanisation de « Masséna-Bruneseau », le projet de déplafonnement des hauteurs ne répond pas aux questions d’une extrême complexité soulevées par l’aménagement de ce secteur. D’un côté, la présence massive à Masséna-Bruneseau et dans sa proximité immédiate de grosses infrastructures ferroviaires et routières, accompagnées d’établissements industriels et commerciaux de grande envergure, pose de nombreuses difficultés à la mise en œuvre d’une urbanisation porteuse d’« urbanité ». De l’autre, la position charnière de ce territoire aux confins de la ZAC Paris rive gauche, à l’articulation de Paris et d’Ivry, à proximité de quartiers à la fois densément peuplés et sous-dotés en équipements publics et commerces, suscite des attentes aussi fortes que légitimes. Ce double défi suppose une réflexion concertée de grande ampleur, qui n’a pas été engagée avant que le Conseil de Paris ne se prononce en mars 2009 sur le choix hautement contestable de faire de la remise en cause du plafond des hauteurs de 37 mètres le pivot de l’aménagement du secteur, ni même avant qu’il ne l’amorce dans une délibération dès juillet 2008.
1.6. Une absence de stratégie de réduction des nuisances
Alors que le secteur Masséna-Bruneseau subit de nombreuses pollutions, sans commune mesure avec la moyenne de la capitale, le dossier d’enquête fait clairement apparaître qu’aucune stratégie de réduction des nuisances n’a été adoptée pour accompagner la stratégie de densification du secteur que veut incarner le déplafonnement des hauteurs. Malgré les efforts de l’association TAM-TAM, la question de l’intégration de l’usine Syctom dans son environnement a été peu abordée dans le cadre du débat public sur sa reconstruction organisé au 2e semestre 2009, et la Ville ne s’est guère investie dans la réflexion. Concernant le boulevard périphérique, plusieurs options ont été envisagées dans les réunions de concertation (réduction de la vitesse, intégration dans un cerclage transparent, etc.), mais ces discussions sont visiblement restées sans lendemain, le dossier d’enquête n’en soufflant mot.
1.7. Des menaces pour l’avenir
En l’absence patente d’une réflexion sur les enjeux spécifiques de Masséna-Bruneseau, le déplafonnement des hauteurs est lourd de menaces sociales et économiques pour le futur quartier. Il signifierait la reproduction des problèmes rencontrés actuellement dans les cités concentrées tout autour de Paris, le long du boulevard périphérique, aggravée par la surdensification créée par le relèvement du plafond au-delà de 37 mètres.
2. Remarques sur les travaux d’investissement routier d’un montant supérieur à 1,9 M€ sur le secteur Masséna-Bruneseau nord
L’association TAM-TAM est favorable au projet de reconfiguration/simplification de l’échangeur du boulevard périphérique qu’elle a, en son temps, appelé de ses vœux. Toutefois, nous estimons nécessaire une stratégie globale d’intégration du périphérique et de réduction de ses nuisances, qui fait pour l’instant défaut (voir paragraphe 1.6).
2.1. Un défaut de propositions pour l’intégration du boulevard périphérique
L’urbanisation du secteur Masséna-Bruneseau, a fortiori en relevant le plafond des hauteurs, implique forcément des mesures pour contenir les nombreuses nuisances apportées par le boulevard périphérique, assorties d’un budget suffisant pour les mettre en œuvre, ce qui ne semble pas le cas à ce stade. Alors que la Ville investit à juste titre des sommes considérables pour couvrir le périphérique en différents points de son parcours afin de protéger les habitants de ses nuisances, il n’est pas concevable qu’elle pusse envisager de concentrer des habitants et des salariés à Masséna-Bruneseau, qui présente les mêmes caractéristiques, sans prendre des mesures ad hoc.
Il est aussi frappant de constater que le déplafonnement demandé ne soit aucunement utilisé pour formuler des propositions architecturales originales pour l’intégration du boulevard périphérique comme de l’échangeur.
2.2. Une carence de réflexion sur la relation de l’échangeur à son environnement
En l’état actuel du dossier, la réflexion sur la relation de l’échangeur à son environnement immédiat apparaît largement carente. Même reconfiguré, l’échangeur reste une infrastructure lourde dont on peut difficilement faire un lieu de promenade. Ce constat implique une réflexion, voire un concours d’idées spécifiques. Faute de quoi l’allée Paris-Ivry, en particulier, et les autres voies proches de l’échangeur ont peu de chance de correspondre aux intentions actuellement affichées par l’aménageur.
3. Conclusions et propositions
3.1. Pour le rejet du projet de révision simplifiée
L’association TAM-TAM se prononce pour le rejet pur et simple de la demande de déplafonnement des hauteurs dans les zones MB 1 comme MB2, portée par la Ville dans sa demande de révision simplifiée du PLU. En effet, dans l’état actuel du dossier d’enquête, les fondements du projet de révision du PLU ne sont pas clairement établis et ne correspondent pas en tout état de cause aux éléments qui ont été communiqués lors des consultations préalables.
Nous proposons que la Ville lance enfin une vraie concertation au niveau parisien, suivant les principes de la Charte de la concertation de 1996, sur son projet de construction de tours et de minitours aux portes de Paris.
3.2. Pour une adaptation concertée des travaux d’investissement routier
L’association TAM-TAM propose que les travaux d’investissement routiers envisagés soient accompagnés d’une réflexion approfondies sur les meilleurs moyens d’intégrer et de réduire les nuisances du boulevard périphérique, assortie de moyens budgétaires pour les mettre en œuvre.
3.3. Pour une stratégie alternative d’aménagement de Masséna-Bruneseau
L’association TAM-TAM demande une relance, dans le cadre du CPC, d’une concertation sur l’aménagement de Masséna-Bruneseau qui situe au premier plan les défis spécifiques du secteur et la réflexion sur les meilleurs moyens d’y répondre pour y réaliser un vrai quartier vivant, équilibré et durable, plutôt que de fixer comme objectif a priori la construction de tours et de minitours.
4. Annexes
4.1. Tract d’appel à une réunion publique organisée par TAM-TAM le 13 février 2008
DES TOURS À PARIS :
Le miroir aux alouettes
Des élus, des architectes, des promoteurs pressés d’ériger des immeubles de grande hauteur profitent de la campagne municipale pour faire croire avec des arguments simplistes qu’ils constitueraient la solution aux problèmes de logement et d’espace de la capitale. Ils escamotent ainsi la réflexion sur les conditions d’émergence de la ville moderne, qui passe moins par des tours que par la mixité sociale et la diversité des activités, la rupture avec la politique des ghettos, une conception de l’identité des quartiers qui ne relève pas du marquage social ou de la spécialisation des fonctions. Ils contournent les vrais enjeux : raccommoder les territoires et repenser l’urbanité.
Réunion publique
Mercredi 13 février 2008 à 19h30
Université Paris 7, Amphi 1A, entrée sud de la « Halle aux farines »
rue Marguerite Duras, Paris 13e (Entrée libre)
M° Bibliothèque François Mitterrand (ligne 14, RER C), sortie Grands Moulins. Bus 62, 64, 89.
Avec :
Jean-Philippe Hugron, architecte, doctorant en urbanisme
UN BILAN DES TOURS PARISIENNES
Jean-Michel Roux, urbaniste
L’ILLUSION DE LA DENSITÉ
Eric Daniel-Lacombe, architecte, urbaniste, paysagiste
LES TOURS CONTRE LA MIXITÉ SOCIALE
Elisabeth Bourguinat, secrétaire de l’association Accomplir
URBANISER AUTREMENT : LA LEÇON DES HALLES
Fabrice Piault, président de l’association Tam-Tam
PENSER LA MODERNITÉ URBAINE AVEC LES HABITANTS
Débat animé par Thierry Paquot, éditeur de la revue Urbanisme
Association TAM-TAM
30, avenue des Gobelins, 75013 Paris. Répondeur/Fax : 01 43 37 12 79. E-mail : association.tamtam@laposte.net
4.2. Tract d’appel à une réunion publique organisée par TAM-TAM le 30 mars 2009
Paris rive gauche, quartier Masséna
Trois petites tours,
et puis cent viendront ?
Pour construire sur 33 hectares, le long du boulevard Masséna, plusieurs tours de bureaux de 100 à 200 mètres et des dizaines de tours de logements jusqu’à 50 mètres (15 étages), le conseil de Paris a décidé, le 10 mars, de casser le plafond de 37 mètres de haut. Sans argument solide et hors de toute concertation, il veut un chèque en blanc pour une stratégie qui fait fi de la modernité et du développement durable.
NON, les tours ne constituent pas la solution aux problèmes de logement et d’espace de la capitale. Ils escamotent au contraire la réflexion sur les conditions d’émergence de la ville moderne, qui n’implique pas la multiplication des tours et des cités dortoirs, mais la promotion de la mixité urbaine et sociale.
Pour une rupture avec la politique des ghettos, pour une conception de l’identité des quartiers qui ne relève pas du marquage social ou de la spécialisation des fonctions, pour affronter les vrais enjeux (raccommoder les territoires, repenser l’urbanité),
Réunion publique
Lundi 30 mars 2009 à 19h30
au Dansoir Karine Saporta
M° Bibliothèque François Mitterrand (ligne 14, RER C) ou Quai de la Gare (ligne 6). Bus 62, 64, 89.
Entrée libre
L’association TAM-TAM présentera les projets de la municipalité. Elle expliquera sa démarche avant un débat auquel participeront l’urbaniste Jean-Michel Roux, Eric Daniel-Lacombe, architecte, urbaniste et paysagiste, et Thierry Paquot, auteur de La folie des hauteurs (Bourin, 2008).
Association TAM-TAM
30, avenue des Gobelins, 75013 Paris. Répondeur/Fax : 01 43 37 12 79. E-mail : association.tamtam@laposte.net
4.3. Tract d’appel à participer à l’enquête publique (février 2010)
Participez à l’enquête publique :
Non
à un quartier de tours
boulevard Masséna !
Du 10 février au 12 mars 2010, une « enquête publique » pour la révision du plan local d’urbanisme de Paris rive gauche se déroule à la mairie du 13e, 1, place d’Italie. Des cahiers d’enquête recueilleront les remarques et critiques des habitants du lundi au vendredi de 8h30 à 17h (le jeudi jusqu’à 19h30), ainsi que le samedi 13 février de 9h à 12h. L’enjeu : la mairie de Paris veut faire sauter le plafond des hauteurs à « Masséna-Bruneseau » pour y concentrer des immeubles de logements jusqu’à 50 mètres de haut (environ 15 étages) et quatre tours de 100 à 200 mètres.
Venez massivement prendre connaissance du projet
et donner votre avis en remplissant les cahiers d’enquête !
• la mairie n’a pas démontré que les tours renforceront la densité urbaine entre Paris et Ivry, ni qu’elles seraient plus écologiques que des édifices plus modestes ;
• Ne tirant pas les leçons du mal-vivre dans les nombreuses cités coincées entre les boulevards des Maréchaux et le boulevard périphérique, le projet ne se donne pas les moyens de réduire les importantes nuisances sonores et olfactives (boulevard périphérique, usine Syctom de retraitement des déchets) dans ce secteur où elle veut concentrer des milliers d’habitants ;
• contrairement aux promesses de la mairie, les tours ne libèreront pas au sol des « espaces publics généreux » : le seul jardin programmé, en fin d’opération de surcroît, n’est pas suffisant pour la population prévue ;
• les équipements publics scolaires, sportifs et culturels prévus sont notoirement insuffisants pour répondre aux besoins des riverains.
Plus de précisions sur
www.associationtamtam.fr
(rubrique « Masséna-Bruneseau »)
Association TAM-TAM, 30, avenue des Gobelins, 75013 Paris / www.associationtamtam.fr
4.4. Demande de prolongation de l’enquête publique (courrier du 18 février 2010)
Association TAM-TAM Paris, le 18 février 2010
30, avenue des Gobelins, 75013 Paris
Répondeur/fax : 01 43 37 12 79
Site : www.associationtamtam.fr
Monsieur Marc BRION
Commissaire enquêteur
Enquêtes publiques Masséna-Bruneseau
Mairie du 13e arrondissement
1, place d’Italie
75634 Paris Cedex 13
Objet : Demande de prolongation des enquêtes publiques Masséna-Bruneseau.
Monsieur le Commissaire enquêteur,
J’ai l’honneur de vous demander, au nom de l’Association TAM-TAM, membre du Comité permanent de concertation (CPC) de Paris rive gauche, une prolongation des deux enquêtes publiques concernant Masséna-Bruneseau (Révision simplifiée du PLU et Travaux d’investissement routier d’un montant supérieur à 1,9 M€) ouvertes le 10 février 2010.
En effet, à l’ouverture de l’enquête, nous avons constaté que la Ville avait introduit in extremis dans le dossier de révision de profondes modifications au projet pour la partie sud du secteur, dite « triangle sud », qui n’ont fait l’objet d’aucune concertation ni information préalables.
Au CPC de Paris rive gauche comme dans les consultations qu’elle a organisées en 2009, la Ville y avait annoncé un aménagement en pleine terre. Or le projet soumis à enquête prévoit de bâtir en grande partie sur dalle, rehaussant la hauteur des bâtiments prévus sous couvert d’un alignement de leur niveau de référence avec celui de la future dalle, et modifiant le profil de la voirie.
Il nous paraît légitime que les citoyens et les associations bénéficient du temps nécessaire pour étudier en détail ces modifications qui vont transformer de fond en comble la physionomie du projet et son coût.
Notre demande de prolongation procède aussi d’autres constats, dommageables à la qualité de l’enquête :
1. La consultation du printemps 2009 n’a pas porté sur le déplafonnement des hauteurs justifiant la demande de révision du PLU, mais seulement sur son accompagnement par le « projet Lion ».
2. Alors qu’elle a très largement médiatisé cette consultation, la Ville n’a fait aucune promotion des présentes enquêtes publiques au-delà de ses obligations légales minimales.
3. La Ville a demandé la planification de ces enquêtes sur un mois comprenant 15 jours de vacances scolaires, de surcroît pendant une campagne électorale accaparant logiquement le débat public.
4. Le seul samedi où les registres d’enquête étaient accessibles au public était le 13 février, soit seulement trois jours après l’ouverture des enquêtes.
Le fait que le secteur Masséna-Bruneseau soit le premier sur lequel la Ville concrétise sa stratégie très controversée d’un urbanisme de tours, justifie à notre avis une enquête publique approfondie.
Espérant que vous ferez bon accueil à notre demande, je vous prie d’agréer, Monsieur le Commissaire enquêteur, l’expression de nos salutations respectueuses
.
Fabrice PIAULT
Président de l’Association TAM-TAM
Copies : Madame Marie-Françoise DEMANT, Commissaire enquêteur suppléante ; Monsieur Bertrand DELANOË, Maire de Paris ; Madame Anne HIDALGO, Première adjointe au Maire de Paris ; Monsieur Jérôme COUMET, Maire du 13e arrondissement de Paris.
• • •
février 2010
Participez à l’enquête publique :
NON
à un quartier de tours
boulevard Masséna !
Depuis le 10 février et jusqu’au 27 mars 2010 à midi, une « enquête publique »
pour la révision du plan local d’urbanisme de Paris rive gauche
se déroule à la mairie du 13e,
1, place d’Italie. Des cahiers d’enquête recueilleront les remarques et critiques
des habitants du lundi au vendredi de 8h30 à 17h (le jeudi jusqu’à 19h30),
ainsi que le samedi 27 mars de 9h à 12h.
L’enjeu : la mairie de Paris veut faire sauter le plafond des hauteurs
à « Masséna-Bruneseau » pour y concentrer des immeubles de logements
jusqu’à 50 mètres de haut (environ 15 étages) et quatre tours de 100 à 200 mètres.
Venez massivement
prendre connaissance du projet
et remplir les cahiers d’enquête !
- La mairie n’a pas démontré que les tours renforceront la densité urbaine entre Paris et Ivry, ni qu’elles seraient plus écologiques que des édifices plus modestes ;
- Ne tirant pas les leçons du mal-vivre dans les nombreuses cités coincées entre les boulevards des Maréchaux et le boulevard périphérique, le projet ne se donne pas les moyens de réduire les importantes nuisances sonores et olfactives (boulevard périphérique, usine Syctom de retraitement des déchets) dans ce secteur où elle veut concentrer des milliers d’habitants ;
- Contrairement aux promesses de la mairie, les tours ne libèreront pas au sol des « espaces publics généreux » : le seul jardin programmé, en fin d’opération de surcroît, n’est pas suffisant pour la population prévue ;
- Les équipements publics scolaires, sportifs et culturels prévus sont notoirement insuffisants pour répondre aux besoins des riverains.
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lundi 30 mars 2009
Trois petites tours et puis cent viendront ?
Le 30 mars réunion publique au Dansoir Karine Saporta sur les tours à Paris.
Le Dansoir Karine Saporta, sur le parvis de la Bibliothèque François Mitterrand, affichait complet lors de la réunion publique sur les tours à Paris.
Pour construire sur 33 hectares, le long du boulevard Masséna, entre Paris 13e et Ivry plusieurs tours de bureaux de 100 à 200 mètres et des dizaines de tours de logements jusqu’à 50 mètres (15 étages), le conseil de Paris a décidé, le 10 mars, de casser le plafond de 37 mètres de haut. Sans argument solide et hors de toute concertation, il veut un chèque en blanc pour une stratégie qui fait fi de la modernité et du développement durable.
NON, les tours ne constituent pas la solution aux problèmes de logement et d’espace de la capitale. Ils escamotent au contraire la réflexion sur les conditions d’émergence de la ville moderne, qui n’implique pas la multiplication des tours et des cités dortoirs, mais la promotion de la mixité urbaine et sociale.
Pour une rupture avec la politique des ghettos, pour une conception de l’identité des
quartiers qui ne relève pas du marquage social ou de la spécialisation des fonctions,
pour affronter les vrais enjeux (raccommoder les territoires, repenser l’urbanité),
Réunion publique
Lundi 30 mars 2009 à 19h30
au Dansoir Karine Saporta
(sur le parvis de la BNF, derrière le MK2)
Métro Bibliothèque François Mitterrand (ligne 14, RER C) ou Quai de la Gare (ligne 6). Bus 62, 64, 89.
L’association TAM-TAM présentera les projets de la municipalité. Elle expliquera sa démarche avant un débat auquel participeront l’urbaniste Jean-Michel Roux, Eric Daniel-Lacombe, architecte, urbaniste et paysagiste, et Thierry Paquot, auteur de La folie des hauteurs (Bourin, 2008).
• • •
3 février 2009
Les enjeux de l’aménagement
du secteur Masséna-Bruneseau
1. Remarques préalables
1.1. Sur la démarche de la Ville
1.2. Sur le défaut de concertation
2. De la singularité du territoire de « Masséna-Bruneseau »
2.1. Le poids des infrastructures
2.2. Le syndrome de la « double banlieue »
2.3. Un certain isolement
2.4. Des difficultés des quartiers voisins
3. Cinq objectifs clés pour l’aménagement
3.1. Relier
3.2. Réduire les nuisances
3.3. Retrouver une échelle humaine
3.4. Innover urbanistiquement et architecturalement
3.5. Penser le rapport à la Seine
4. Pour un programme ambitieux
4.1. De vrais quartiers
4.2. Une approche moderne et durable du logement
4.3. Une mixité des programmes et des activités
4.4. Une réflexion sur les équipements et les services
4.5. Une réflexion sur le commerce
5. Les hauteurs, une question subsidiaire
5.1. Un préalable stupide et dangereux
5.2. L’illusion de la densité
6. Conclusions
6.1. Sur la stratégie d’aménagement
6.2. Sur la concertation
6.3. Sur les échéances
7. Annexe : Synthèse des propositions
1. Remarques préalables
L’aménagement de « Masséna-Bruneseau » soulève des questions d’une extrême complexité. D’un côté, la présence massive dans le secteur et dans sa proximité immédiate de grosses infrastructures ferroviaires et routières, accompagnées d’établissements industriels et commerciaux de grande envergure, pose de nombreuses difficultés à la mise en œuvre d’une urbanisation porteuse d’« urbanité ». De l’autre, la position charnière de ce territoire aux confins de la ZAC Paris rive gauche, à l’articulation de Paris et d’Ivry, à proximité de quartiers à la fois densément peuplés et sous-dotés en équipements publics et commerces, suscite des attentes aussi fortes que légitimes. Ce double défi suppose une réflexion concertée de grande ampleur, dont on peut regretter qu’elle n’ait pas été engagée avant que le Conseil de Paris ne se prononce en mars 2009 sur le choix hautement contestable de faire de la remise en cause du plafond des hauteurs de 37 mètres le pivot de l’aménagement du secteur, et même avant qu’il ne l’amorce dans une délibération dès juillet 2008.
Sur le fond, en posant comme préalable à toute stratégie d’aménagement de Masséna-Bruneseau la construction de tours, la démarche de la Ville se révèle largement au-dessous des enjeux du secteur.
En faisant de ce secteur l’un des six secteurs visés par un objectif de « mise en œuvre de nouvelles formes urbaines » (comprendre, à la lumière du « workshop » créé en 2007 au sein du Conseil de Paris, « faire appel à des formes architecturales vieilles de plus d’un siècle (les tours) », la Ville s’est privée d’une réflexion et d’une concertation riches partant de la singularité de Masséna-Bruneseau. Il apparaît clairement que, au cours des derniers mois, les objectifs assignés à l’architecte coordinateur du secteur, Yves Lion, se sont concentrés sur la localisation et l’intégration d’immeubles de grande hauteur (IGH) et de minitours de logements de 50m, indépendamment d’une véritable réflexion programmatique.
Par rapport à ceux affirmés il y a six ans dans le cahier des charges du concours qui a conduit à la sélection des ateliers Lion, les objectifs de constructibilité du secteur ont été quasiment doublés par la délibération de juillet 2008 du Conseil de Paris sans réflexion sur les implications programmatiques de ce changement majeur. Ils sont passés d’environ 285 000 m2 à une fourchette de 400 000 à 490 000 m2.
Aussi, d’une part, en encourageant les Ateliers Lion à établir un plan masse sans que celui-ci repose sur une réflexion programmatique approfondie, la Ville met la charrue avant les bœufs et passe largement à côté des enjeux.
D’autre part, la stratégie d’aménagement se trouve également faussée par l’empressement de la Ville à faire voter au Conseil de Paris un déplafonnement des hauteurs sur l’ensemble du secteur, sans attendre que soient effectivement menées la réflexion et la concertation indispensables sur les plans programmatique et urbain.
L’absence de toute concertation sur les objectifs de la Ville, au mépris des propres prises de position du maire de Paris pendant ses campagnes électorales de 2001 et de 2008, et de l’existence depuis avril 1997 d’un Comité permanent de concertation (CPC) à Paris rive gauche suivant les principes de la Charte de la concertation de 1996 est particulièrement frappante.
Ni le cahier des charges des études menées dans le cadre du « workshop », ni leurs conclusions n’ont fait l’objet de la moindre concertation. Tout juste les membres du CPC ont-ils eu droit à une présentation des résultats au printemps 2008, soit plusieurs mois après qu’elles aient fait l’objet de présentations dans la presse pour nourrir une campagne de propagande à sens unique.
De même, les objectifs de la Ville en matière d’IGH et de déplafonnement des hauteurs n’ont fait l’objet d’aucune concertation, ni avant la délibération de juillet 2008, ni après, ni dans la perspective de la délibération de mars 2009. Seules deux réunions d ‘un « groupe de travail » ont eu lieu à l’automne 2008 et en janvier 2009, sans la participation de l’adjointe au maire de Paris chargée de l’urbanisme, et sans dimension programmatique, pour présenter l’évolution des travaux d’Yves Lion.
>>> Proposition 1 : L’association TAM-TAM demande que l’option d’un déplafonnement des hauteurs dans le secteur Masséna-Bruneseau ne soit éventuellement soumise au vote du Conseil de Paris qu’à l’issue d’une large concertation programmatique articulant, autour du Comité permanent de concertation de Paris rive gauche et sous la responsabilité de son Bureau, des réunions publiques et des ateliers participatifs, et qu’elle ne porte, le cas échéant que sur les îlots nécessitant un déplafonnement et non sur l’ensemble du secteur.
>>> Proposition 2 : que la finalisation et la validation du projet Lion soient précédées par la conduite d’une réflexion programmatique sur les objectifs de l’aménagement, qui intègre des études des besoins sur les quartiers limitrophes.
2. De la singularité du territoire de « Masséna-Bruneseau »
2.1. Le poids des infrastructures
Le secteur « Masséna-Bruneseau » est marqué par la présence d’infrastructures lourdes, situées à des niveaux différents, compliquant considérablement son aménagement.
– De la porte de Vitry à la porte de Charenton, le boulevard Masséna, prolongé par la traversée de la Seine et le boulevard Poniatowski, se présente comme un interminable pont entre le 13e et le 12e.
– Le faisceau ferroviaire des voies d’Austerlitz atteint, au-delà du boulevard Masséna, son amplitude maximale, accentuée par la présence sur ses flancs de nombreux ateliers et garages SNCF.
– Le boulevard périphérique traverse le secteur à une altitude de plusieurs dizaines de mètres au-dessus du sol, tandis que l’emprise de l’échangeur, dont nous nous félicitons du projet de reconfiguration, est considérable.
– Le secteur comprend également les ciments Calcia, et jouxte une importante zone d’activité côté Ivry : Usine Syctom (retraitement des déchets), grandes surfaces Leroy-Merlin et Truffaut, multiplexe cinématographique, etc.
2.2. Le syndrome de la « double banlieue »
Dans son état actuel, le secteur Masséna-Bruneseau, avec le secteur mitoyen d’Ivry, se présente comme une « double banlieue », c’est à dire qu’il a été traité comme tel à la fois par Paris et par Ivry, qui y ont relégué des activités diverses qu’elles ne savaient pas où situer. Aussi, le premier enjeu de l’aménagement de ce secteur consiste à opérer une forme de révolution copernicienne qui replacera au « centre » un territoire doublement périphérique qui, pour l’instant, éloigne par nature les deux communes.
2.3. Un certain isolement
Dans sa disposition actuelle, le secteur Masséna-Bruneseau apparaît aussi comme relativement isolé. Il semble éloigné des secteurs mitoyens, et singulièrement des quartiers habités les plus proches dans le 13e ancien, le 13e nouveau, le 12e ainsi qu’à Ivry voire Charenton par l’importance et la nature de la voirie et des infrastructures industrielles qu’il porte. L’émergence sur ce territoire difficile d’un véritable quartier animé et convivial dépendra de la capacité du plan d’aménagement à penser des continuités urbaines, c’est à dire non seulement des voies de liaison physiques et sociales, mais aussi des continuités de peuplement avec les quartiers Bédier-Boutroux et Patay-Masséna, avec Ivry des deux côtés du faisceau ferroviaire ainsi qu’en direction du 12e.
2.4. Des difficultés des quartiers voisins
Alors que, jusqu’à présent, l’aménagement de Paris rive gauche a toujours été conçu en lui-même, sans prendre en compte les besoins des quartiers environnants, la modernité de Masséna-Brunesau pourra notamment s’illustrer dans la capacité de ce nouveau quartier à répondre à des besoins sociaux préexistant dans les secteurs mitoyens. Le secteur de la porte de Vitry en particulier est marqué par un net déficit en matière de commerces, de services et d’équipements. L’une des clés de la réussite de l’aménagement repose sur sa capacité intrinsèque à générer des passerelles avec l’ensemble de son environnement urbain, en s’appuyant notamment sur l’atout de l’arrivée prochaine du tramway.
3. Cinq objectifs clés pour l’aménagement
Cinq objectifs transversaux s’imposent à tous les niveaux de l’élaboration du plan d’aménagement de Masséna-Bruneseau, qui doivent donner lieu à une réflexion qui concerne aussi bien la conception de la voirie, la morphologie générale du quartier, le plan masse, les objectifs programmatiques et l’agencement des programmes, l’architecture des bâtiments et même « l’atmosphère » du futur quartier.
3.1. Relier
La question des liaisons urbaines indispensables en direction des autres secteurs du 13e, du 12e arrondissement et d’Ivry ne se pose pas seulement en termes physiques (la nature de la voirie), mais aussi en terme social, afin que se créent des liens riches entre les secteurs et entre les populations. Cette dimension passe aussi bien par une réflexion sur les fonctions des différents axes existants ou projetés, mais aussi sur les programmes qu’ils relient (activités de toute nature, logements, commerces, services, équipements) et sur leur capacité à générer de l’échange et de la convivialité.
Cette approche trouve naturellement son sens dans le secteur dit du « triangle », au sud-ouest du faisceau ferroviaire, dont la conception et le programme doivent être repensés dans un cadre plus vaste qui intègre le quartier Bédier-Boutroux, et dans une certaine mesure une partie de Patay-Masséna et l’amorce d’Ivry. En élargissant le champ, on posera en des termes renouvelés les questions des équipements, des services et des commerces aujourd’hui sous-estimés dans la réflexion ; du traitement de l’avenue de la porte de Vitry ; de la localisation du jardin, qui gagnerait à être agrandi et rapproché de l’avenue de la porte de Vitry pour profiter au quartier neuf comme aux quartiers ancien ; de la structure du réseau viaire ; de l’alignement des rues pour l’heure non assuré entre Bédier-Boutroux et le « triangle ».
>>> Proposition 3 : Penser la programmation et concevoir l’aménagement du secteur dit du « triangle » dans un cadre plus vaste intégrant le quartier Bédier-Boutroux ainsi que, dans une certaine mesure, Patay-Masséna et l’amorce d’Ivry.
Dans le même sens, la revitalisation du boulevard Masséna/Jean Simon comme véritable boulevard urbain s’impose comme une priorité de l’aménagement. Il importe de lui donner les moyens, à travers sa forme physique et les programmes de commerces, de services et d’équipements qu’il portera, d’incarner la diversité et la multiplicité des visages et des fonctions de la ville.
Au stade actuel, les propositions des ateliers Lion ne répondent qu’imparfaitement à cet objectif :
– sur son flanc ouest, à proximité de la porte de Vitry, l’intégration de la ligne de petite ceinture dans un front partiellement bâti nous paraît devoir être étudié ;
– sur son flanc est, le belvédère prévu au-dessus du faisceau ferroviaire nous paraît pouvoir supporter de petits bâtiments ou kiosques sans remettre en cause l’idée d’une perspective visuelle en direction d’Ivry ;
– enfin, de part et d’autre du boulevard, dans le tronçon le plus proche de la Seine, il nous semble souhaitable d’envisager une urbanisation continue, par exemple, sur le flanc est, en déplaçant l’escalier projeté en direction de la Seine en cœur d’ilot plutôt que le long du boulevard.
>>> Proposition 4 : Se donner les moyens de requalifier le boulevard Masséna/Jean Simon comme véritable boulevard urbain rapprochant le 13e ancien de la Seine et du 12e en préférant une densification horizontale à une densification verticale (tours), et donc assurer son urbanisation continue des deux côtés sur la quasi-totalité de son parcours et mener une réflexion approfondie sur les programmes qu’il portera.
Entre les voies ferrées et la Seine, le rôle décisif de la rue Bruneseau d’une part, de la nouvelle « Allée Paris-Ivry » d’autre part pour relier physiquement Paris et Ivry justifie une réflexion programmatique approfondie pour se donner tous les moyens que ces axes puissent jouer leur rôle social dans les meilleures conditions. Il s’agit de penser l’organisation de la mixité sociale et urbaine, l’implantation des logements, les possibilités d’implantations commerciales (notamment de proximité), la nature et localisation des activités non tertiaires, la conception des bureaux, les besoins en services et en équipements publics, aussi bien que la conception de l’urbanisation dans la proximité immédiate de l’échangeur reconfiguré du boulevard périphérique.
>>> Proposition 5 : Développer une réflexion programmatique globale sur le secteur compris entre la rue Bruneseau et la Seine, qui permette aux voies existantes ou projetées (rue Bruneseau, allée Paris-Ivry…) de jouer pleinement leur rôle de lien social entre Paris et Ivry.
3.2. Réduire les nuisances
La réduction des nuisances du secteur passe notamment par la requalification du boulevard Masséna/Jean Simon en boulevard civilisé, déjà évoquée plus haut ; par la reconfiguration de l’usine Syctom de traitement des déchets (en cours, et sur laquelle TAM-TAM a formulé des propositions par ailleurs) ; et par une réflexion spécifique sur le boulevard périphérique.
Si la « digestion » du boulevard périphérique dans le maillage urbain apparaît comme un objectif illusoire dans ce secteur qu’il traverse sous forme d’un pont suspendu, des formules permettant de mieux intégrer les bretelles d’accès de l’échangeur reconfiguré paraissent envisageables.
Plutôt qu’à un espace paysager, le secteur de l’échangeur se prête à une urbanisation plus poussée que ne l’envisage le projet Lion, pour des activités secondaires ou tertiaires, en particulier :
– le long du quai, de la rue Berlier à Ivry en passant sous le pont du périphérique ;
– sur le flanc est de la rue Berlier, le long de la bretelle d’accès au périphérique intérieur ;
– sur le flanc nord de l’allée Paris-Ivry, entre la rue Berlier et la rue Bruneseau.
Une stratégie de densification des activités dans l’immédiate proximité de l’échangeur permettrait aussi d’éviter de recourir à une architecture de tours qui irait à l’encontre de l’objectif de constitution entre Paris et Ivry d’un quartier plus civilisé, destiné à accueillir une proportion de logements non négligeable.
>>> Proposition 6 : Repenser l’urbanisation dans l’environnement immédiat de l’échangeur du boulevard périphérique dans le sens d’une densification plus importante au sol qui se substituerait à un plan juxtaposant tours et espaces paysagers inutilisables du fait de leur localisation sous et autour de l’autoroute urbaine.
Par ailleurs, une réflexion fructueuse pourrait s’ouvrir sur l’intégration et l’évolution du paysage ferroviaire, qui mériterait de passer du statut de « contrainte d’aménagement » à celui d’« élément structurant du secteur participant du spectacle de la ville ». Initiée par certaines propositions des ateliers Lion (belvédère au niveau du boulevard Jean Simon, promenade plantée au sud des voies) qui mériteraient d’être approfondies, elle pourrait s’élargir, en liaison avec la commune d’Ivry, RFF et la SNCF, à des travaux sur les hypothèses de franchissement des voies au-delà du périphérique, par exemple par des ponts construits.
>>> Proposition 7 : Engager une réflexion globale sur le traitement et la mise en valeur du paysage ferroviaire en liaison avec la commune d’Ivry, RFF et la SNCF.
3.3. Retrouver une échelle humaine
Si l’arrivée du tramway contribuera à la « civilisation » du boulevard Masséna, du secteur Masséna-Bruneseau et plus largement de la cité, le développement d’une stratégie d’urbanisation à dimension et visage humains implique d’autres mesures tout aussi importantes, qui touchent à la convivialité des espaces publics, aux dimensions des parcelles, aux hauteurs ou encore aux conditions de déplacement.
L’esplanade projetée au cœur de la fourche qui marque l’intersection de l’avenue de France et du boulevard Masséna/Jean Simon doit pouvoir se constituer comme une place urbaine, un lieu d’échanges, de rencontres et de rendez-vous concentrant services et commerces.
>>> Proposition 8 : penser la « fourche » à l’extrémité de l’avenue de France comme une place urbaine, c’est à dire porteuse d’urbanité par sa conception, sa physionomie et les programmes qui la bordent.
Parallèlement, il importe à la fois de limiter la dimension des parcelles pour créer une plus grande variété architecturale et éviter une logique de grands ensembles discriminante socialement ; et de limiter les hauteurs des immeubles pour éviter la création, par le jeu des prospects, d’un quartier et d’un paysage de tours générateurs à terme de surcoûts de gestion pour les habitants et la collectivité, de nuisances pour l’environnement et à terme de malaise social. Pour répondre à des objectifs ambitieux de constructibilité, l’aménagement de Masséna-Bruneseau doit privilégier une densification horizontale qui produit de la proximité et de la convivialité sur une densification verticale accompagnée de vastes espaces interstitiels qui suscitent insécurité et instabilité.
>>> Proposition 9 : Privilégier la densification horizontale en misant sur une limitation de la taille des parcelles et de la hauteur des bâtiments sur l’ensemble du secteur pour en assurer la convivialité.
L’établissement de continuités urbaines dans le secteur vise aussi à faciliter les déplacements piétonniers et plus largement les circulations douces, dont le développement nécessite une conception conviviale et chaleureuse de la ville. A contrario, une cité qui ne se donne pas en spectacle, qui n’est plus qu’une juxtaposition d’édifices de grande dimension sans relation naturelle à la voirie, encourage la circulation automobile, la traversée plutôt que la flânerie.
>>> Proposition 10 : Organiser sur l’ensemble du secteur la priorité aux circulations douces, et particulièrement aux déplacements piétonniers, en articulation avec les transports en commun.
3.4. Innover urbanistiquement et architecturalement
Paradoxalement, par sa complexité (différences de niveau, impact des infrastructures ferroviaires, etc.), le secteur Masséna-Bruneseau se prête particulièrement à des gestes urbains et architecturaux originaux, comme d’ailleurs l’ensemble de Paris rive gauche où cette opportunité à malheureusement été très peu exploitée jusque là.
Plusieurs terrains mériteraient des concours d’idées pour déboucher sur des options urbaines et des gestes architecturaux remarquables. Il serait stimulant, par exemple :
– de penser sur le flanc ouest du boulevard Masséna, entre la rue de Patay et l’avenue de France, une forme architecturale permettant d’assurer une continuité du bâti tout en intégrant, sans l’occulter, la ligne de petite ceinture ;
– d’imaginer des formules permettant au « belvédère » au dessus du faisceau ferroviaire de ne pas se réduire à une esplanade balayée par les vents ;
– de penser les bordures et des traversées du faisceau ferroviaire (ponts construits, passerelles aux formes et dimensions ludiques, etc.) ;
– de repenser la tête de pont qui franchit le quai pour relier le 13e au 12e ;
– d’envisager des constructions originales au cœur même de l’échangeur reconfiguré du boulevard périphérique.
>>> Proposition 11 : établir un inventaire des lieux qui pourraient générer des solutions urbaines et des gestes architecturaux originaux au travers de concours d’idées permettant de sélectionner des équipes innovantes et de requalifier par leur intermédiaire certains projets.
3.5. Penser le rapport à la Seine
Comme auparavant les aménagements des secteurs Tolbiac et Masséna, l’urbanisation de Masséna-Bruneseau constitue l’occasion de faciliter l’accès à la Seine à des franges de la population qui en sont coupées bien qu’elles en soient proches. L’aménagement des quais et des berges dans ce secteur doit notamment permettre d’assurer la continuité de promenade piétonne et cycliste le long de la Seine entre Paris et Ivry tout en garantissant les conditions de fonctionnement et de développement des activités industrielles qui utilisent les berges dans le périmètre et à Ivry.
>>> Proposition 12 : engager une concertation combinée sur l’aménagement des berges et des quais de Seine entre Paris et Ivry et sur la nature du front bâti à concevoir le long des quais.
4. Pour un programme ambitieux
Le projet développé par les ateliers Lion pour Masséna-Bruneseau a cherché, à partir des débats menés il y a cinq ans et de la poursuite de plusieurs intuitions, à résoudre une partie des questions soulevées, notamment en matière de liaisons physiques entre Paris et Ivry et de maîtrise des nuisances du boulevard périphérique. Toutefois, il souffre de l’absence d’une véritable réflexion programmatique concertée sur le secteur de la part de Paris et d’Ivry.
TAM-TAM ne saurait répondre seule à cette carence programmatique, dont le comblement nécessite diverses études pluridisciplinaires prenant largement en compte l’environnement de Masséna-Bruneseau. Elle entend en revanche pointer cinq pistes de travail.
4.1. De vrais quartiers
L’un des enjeux majeurs de l’aménagement de Masséna-Bruneseau est d’y constituer de vrais quartiers synergiquement reliés aux quartiers voisins de Paris et d’Ivry. Cela implique de penser globalement les besoins en services, commerces et équipements des quartiers neufs et anciens, sans s’arrêter aux frontières de la ZAC, et d’organiser une véritable mixité urbaine, en pensant les bassins de population permanente et de salariés de passage de telle sorte qu’ils permettent de créer des pôles de vie incluant commerces, services et équipements.
>>> Proposition 13 : Nourrir la réflexion programmatique d’études et inventaires des besoins en services, commerces et équipements publics.
4.2. Une approche moderne et durable du logement
Le secteur Masséna-Bruneseau offre la double opportunité de permettre de répondre à une partie des besoins en logements dans la capitale tout en rompant avec la stratégie de développement de cités qui a marqué les dernières décennies à Paris et dans sa périphérie comme dans d’autres grandes villes avec son cortège de tensions et de dégradations.
Une approche moderne et durable du logement, et notamment du logement social, plaide pour des unités distinctes aux dimensions maîtrisées et à l’architecture variée et individualisée, permettant un confort de vie en évitant à la fois une uniformisation des logements qui nie la singularité des personnalités, et l’envolée des charges (énergie, ascenseurs, etc.).
>>> Proposition 14 : Engager, préalablement à l’établissement des fiches de lots, une réflexion globale sur les conditions à réunir pour concevoir des immeubles de logements durables, à dimension humaine.
4.3. Une mixité des programmes et des activités
La mixité des programmes et des activités constitue un autre élément majeur pour assurer la convivialité et donc le bon fonctionnement du nouveau quartier. Elle constitue un objectif stratégique, à l’opposé de la stratégie de zonage privilégiée jusqu’à présent dans le secteur, qui mise sur la juxtaposition de tours de bureaux, de concentrations d’activités de type PME-PMI et d’immeubles de logements.
A Masséna-Bruneseau, deux pistes peuvent être poursuivies :
– un effort de diversification des activités susceptibles d’être accueillies dans le secteur, accordant la priorité à des PME-PMI à dimension industrielle ou artisanale et rompant avec la concentration exclusive de bureaux qui a prévalu dans le reste de Paris rive gauche ;
– un effort de mixité des programmes cherchant, suivant la localisation, à développer des bâtiments accueillant à la fois des activités non tertiaires, des bureaux, des logements, des commerces, des services et des équipements ou tout au moins une partie d’entre eux.
>>> Proposition 15 : Créer les conditions de développement d’immeubles multifonctions, abritant plusieurs programmes de nature différente (logements, activités non tertiaires, bureaux, commerces, équipements…).
4.4. Une réflexion sur les équipements et les services
Au contraire de la démarche qui a prévalu dans les autres secteurs de Paris rive gauche, il importe de développer une réflexion sur les équipements (éducatifs, culturels, sportifs, etc.) et les services qui ne prenne pas seulement en compte les besoins attendus des nouveaux habitants de Masséna-Bruneseau, mais aussi les besoins préexistant des habitants des quartiers riverains (Bédier-Boutroux, Patay-Masséna…), dont on observe qu’ils figurent, au sein de la ville, parmi les plus défavorisés.
>>> Proposition 16 : Mener une réflexion et des études sur les besoins en équipements et services à la fois dans le futur quartier Masséna-Bruneseau et dans les quartiers Bédier-Boutroux et Patay-Masséna, afin de les traiter globalement.
4.5. Une réflexion sur le commerce
Le bilan de l’implantation des commerces à Paris rive gauche, et singulièrement le bilan très négatif en matière de commerces de proximité, fait apparaître les ravages d’une stratégie de saupoudrage qui, dans des quartiers à faible densité d’habitants permanents, ne permet pas de générer une véritable dynamique commerciale. Les leçons doivent en être tirés pour Masséna-Bruneseau où l’on doit envisager une double stratégie pour assurer le développement du commerce, et notamment des commerces de bouche :
– concentrer les commerces de proximité sur une ou deux artères : boulevard Masséna ? Avenue de la porte d’Ivry ? Allée Paris-Ivry ?
– implanter au moins un secteur de commerces de bouche à la charnière des quartiers neuf et ancien, afin de profiter d’une zone de chalandise élargie.
>>> Proposition 17 : Concentrer les commerces de proximité, et singulièrement les commerces de bouche, sur une ou deux artères, dont l’une au moins à proximité des quartiers anciens.
5. Les hauteurs, une question subsidiaire
Des objectifs et des réflexions programmatiques à mettre en œuvre à Masséna-Bruneseau découle le caractère subsidiaire de la construction de tours et de bâtiments dépassant le plafond des hauteurs fixé pour l’instant au niveau de 37 mètres, déjà non négligeable comme l’on peut déjà le constater tout au long de l’avenue de France. De fait, l’hypothèse des tours ne répond à aucun des défis et des enjeux majeurs du secteur.
5.1. Un préalable stupide et dangereux
L’installation de l’hypothèse des tours au cœur des perspectives d’aménagement du secteur Masséna-Bruneseau a déjà fait des ravages en oblitérant le débat programmatique et urbain indispensable sur les spécificités du secteur. En outre, il ne l’enrichit sur aucun plan :
– l’affirmation simpliste et non argumentée selon laquelle le relèvement à 50 mètres du plafond des hauteurs des immeubles de logement permettrait de répondre aux attentes des Parisiens dans ce domaine évacue complètement le débat sur les moyens de développer des projets de logements sociaux durablement viables, évitant le syndrome des cités et la concentration des difficultés de toute nature (misère sociale, vue sur le périphérique, ascenseurs en panne, etc.) ;
– la construction d’IGH de bureaux, qui ne séduit guère la plupart des salariés, apparaît le plus souvent contradictoire avec la plupart des objectifs de développement durable, en dépit des réflexions pour l’instant fort partielles sur la « tour écologique ».
– Enfin, tandis que l’idée que les tours permettraient de procéder à des gestes architecturaux remarquables reste à démontrer, il est clair que la projection des tours comme une priorité de la Ville apparaît comme un substitut à la réflexion sur les gestes urbains et architecturaux susceptibles de faire avancer Paris et de marquer sa modernité (cf. paragraphe 3.4, pp. 8-9).
5.2. L’illusion de la densité
En cherchant à promouvoir les tours, la Ville a cherché à faire croire qu’elles permettraient de contribuer à la densification de la cité, tout en dégageant « des espaces généreux » (au pied des tours). Tandis que plusieurs chercheurs ont démontré que le tissu haussmannien était sensiblement plus dense que les territoires piqués de tours, du fait des prospects imposés par la législation française, cette proposition se révèle particulièrement inadéquate à Masséna-Bruneseau.
L’examen du projet réalisé par Yves Lion pour répondre à la commande de la Ville montre que les seuls « espaces généreux » dégagés par les tours le sont au cœur et autour de l’échangeur du boulevard périphérique, où ils ne sont d’aucune utilité. A contrario, là où la densification nécessiterait la création d’un grand jardin, la remise en cause du plafond des hauteurs ne génère, dans le secteur dit du « triangle », qu’un square de dimensions modestes !
6. Conclusions
6.1. Sur la stratégie d’aménagement
Pour que l’aménagement de Masséna-Bruneseau soit porteur de modernité, d’innovation et de créativité sur le fond, tout en répondant à la nécessité de densifier la ville et de répondre aux besoins de logements, il apparaît aujourd’hui indispensable que la municipalité renverse sa démarche. Nous attendons que, sans poser comme préalable la remise en cause du plafond des hauteurs, elle ouvre une intense concertation sur les enjeux programmatiques et urbanistiques du secteur, avant de demander dans un second temps aux ateliers Lion d’en proposer des traductions en terme de plan masse.
6.2. Sur la concertation
Pour que l’aménagement de Masséna-Bruneseau soit porteur de modernité, d’innovation et de créativité dans la forme, il importe que s’organise autour du Comité permanent de concertation de Paris rive gauche, et sous la responsabilité de son bureau, un large processus de concertation articulant des réunions publiques, des ateliers participatifs et les groupes de travail du CPC, sanctionné par des débats stratégiques au CPC et au Conseil de Paris.
6.3. Sur les échéances
Pour que la Ville respecte les engagements qu’elle a pris en matière de concertation, il importe que le processus de concertation précède la décision du Conseil de Paris, et non qu’il le suive. Aussi, nous souhaitons que les orientations de l’aménagement de Masséna-Bruneseau, et singulièrement une remise en cause du plafond des hauteurs ne soient pas arrêtées dès mars au Conseil de Paris, mais seulement à l’issue du processus de concertation, dans un an.
7. Annexe : Synthèse des propositions
>>> Proposition 1 : L’association TAM-TAM demande que l’option d’un déplafonnement des hauteurs dans le secteur Masséna-Bruneseau ne soit éventuellement soumise au vote du Conseil de Paris qu’à l’issue d’une large concertation programmatique articulant, autour du Comité permanent de concertation de Paris rive gauche et sous la responsabilité de son Bureau, des réunions publiques et des ateliers participatifs, et qu’elle ne porte, le cas échéant que sur les îlots nécessitant un déplafonnement et non sur l’ensemble du secteur.
>>> Proposition 2 : que la finalisation et la validation du projet Lion soient précédées par la conduite d’une réflexion programmatique sur les objectifs de l’aménagement, qui intègre des études des besoins sur les quartiers limitrophes.
>>> Proposition 3 : Penser la programmation et concevoir l’aménagement du secteur dit du « triangle » dans un cadre plus vaste intégrant le quartier Bédier-Boutroux ainsi que, dans une certaine mesure, Patay-Masséna et l’amorce d’Ivry.
>>> Proposition 4 : Se donner les moyens de requalifier le boulevard Masséna/Jean Simon comme véritable boulevard urbain rapprochant le 13e ancien de la Seine et du 12e en préférant une densification horizontale à une densification verticale (tours), et donc assurer son urbanisation continue des deux côtés sur la quasi-totalité de son parcours et mener une réflexion approfondie sur les programmes qu’il portera.
>>> Proposition 5 : Développer une réflexion programmatique globale sur le secteur compris entre la rue Bruneseau et la Seine, qui permette aux voies existantes ou projetées (rue Bruneseau, allée Paris-Ivry…) de jouer pleinement leur rôle de lien social entre Paris et Ivry.
>>> Proposition 6 : Repenser l’urbanisation dans l’environnement immédiat de l’échangeur du boulevard périphérique dans le sens d’une densification plus importante au sol qui se substituerait à un plan juxtaposant tours et espaces paysagers inutilisables du fait de leur localisation sous et autour de l’autoroute urbaine.
>>> Proposition 7 : Engager une réflexion globale sur le traitement et la mise en valeur du paysage ferroviaire en liaison avec la commune d’Ivry, RFF et la SNCF.
>>> Proposition 8 : penser la « fourche » à l’extrémité de l’avenue de France comme une place urbaine, c’est à dire porteuse d’urbanité par sa conception, sa physionomie et les programmes qui la bordent.
>>> Proposition 9 : Privilégier la densification horizontale en misant sur une limitation de la taille des parcelles et de la hauteur des bâtiments sur l’ensemble du secteur pour en assurer la convivialité.
>>> Proposition 10 : Organiser sur l’ensemble du secteur la priorité aux circulations douces, et particulièrement aux déplacements piétonniers, en articulation avec les transports en commun.
>>> Proposition 11 : établir un inventaire des lieux qui pourraient générer des solutions urbaines et des gestes architecturaux originaux au travers de concours d’idées permettant de sélectionner des équipes innovantes et de requalifier par leur intermédiaire certains projets.
>>> Proposition 12 : engager une concertation combinée sur l’aménagement des berges et des quais de Seine entre Paris et Ivry et sur la nature du front bâti à concevoir le long des quais.
>>> Proposition 13 : Nourrir la réflexion programmatique d’études et inventaires des besoins en services, commerces et équipements publics.
>>> Proposition 14 : Engager, préalablement à l’établissement des fiches de lots, une réflexion globale sur les conditions à réunir pour concevoir des immeubles de logements durables, à dimension humaine.
>>> Proposition 15 : Créer les conditions de développement d’immeubles multifonctions, abritant plusieurs programmes de nature différente (logements, activités non tertiaires, bureaux, commerces, équipements…).
>>> Proposition 16 : Mener une réflexion et des études sur les besoins en équipements et services à la fois dans le futur quartier Masséna-Bruneseau et dans les quartiers Bédier-Boutroux et Patay-Masséna, afin de les traiter globalement.
>>> Proposition 17 : Concentrer les commerces de proximité, et singulièrement les commerces de bouche, sur une ou deux artères, dont l’une au moins à proximité des quartiers anciens.
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15 octobre 2008
Observations sur les études de faisabilité
du centre de valorisation énergétique Ivry/ParisXIII
(Note du 20 octobre 2008, pour faire suite à la réunion du Comité de pilotage du 15 octobre 2008)
Le rendu final des études de faisabilité opéré lors de la réunion du Comité de pilotage du 15 octobre dernier, est l’aboutissement du processus visant à définir le meilleur scénario du projet d’implantation d’une nouvelle usine SYCTOM sur le site d’IVRY. Avant que ne s’ouvre le débat public sur ce sujet prévu fin 2009, il importe que toutes les observations issues de cette phase d’étude nourrissent le cahier des charges du futur projet et conduisent à faire les choix les plus judicieux.
C’est dans ce cadre et avec cet objectif que nous souhaitons voir prises en compte les observations suivantes.
1. Responsabilité politique
Le projet BERIM propose une réalisation en deux étapes avec transformation de batiments existants et récemment construits. Un tel scénario ne peut s’envisager sans que la municipalité d’Ivry ne s’engage fermement dans une restructuration urbaine de ce secteur et n’en garantisse la complète réalisation à très court terme, par exemple en signant une lettre d’engagement avec chiffrage du coût des travaux urbains corollaires à la construction de l’usine, qui serait versée en annexe du dossier soumis au débat public. L’absence d’un tel engagement porterait le risque que le programme ne soit pas réalisé dans sa totalité ou seulement trés tardivement, avec un impact très négatif sur le secteur pendant plusieurs décénies. L’usine ayant une durée de vie limitée, les choix urbains doivent être assumés et réalisés parallèlement dans les plus brefs délais.
2. Intégration urbaine
L’impératif d’intégration urbaine doit être placé au cœur de la démarche de création et de structuration du projet d’usine. Or si toutes les équipes ont souligné qu’il était possible de répondre positivement aux exigences énergétiques et de sécurité, une seule a présenté la réflexion urbanistique comme préalable à sa démarche de conception de projet. Nous abondons dans son sens, sans négliger évidemment les aspects techniques et énergétiques.
3. Espaces publics
Pour faciliter l’intégration, il importe d’approfondir les pistes de réflexion ouvertes par les équipes qui envisagent de ne pas concevoir l’usine dans un enclos fermé, mais d’en favoriser la porosité. Le projet GIRUS montre par exemple qu’il serait possible de disperser dans l’espace public différents éléments de l’usine en constituant ainsi à la fois un paysage urbain singulier et un espace tampon. Cette approche est essentielle pour rendre l’usine future aussi « acceptable » par son environnement, voire aussi « accueillante » que possible. Une attention particulière doit être portée aux moyens de créer de la diversité á l´échelle du piéton dans cet environnement peu propice à la balade. L’idée développée par GIRUS d’une peau résille pouvant laisser entrevoir l’intérieur de l’usine est partie intégrante de cette démarche.
4. Enfouissement des installations
Deux équipes ont opté pour des installations en très grandes partie enterrées. Cette option est certes plus coûteuse, mais aussi très séduisante. Elle peut se combiner avec les objectifs de compacité que les equipes concernées ont souligné dans leur présentation. Ces deux axes doivent figurer dans les objectifs du projet car, en impactant fortement la volumétrie hors sol du projet, ils peuvent contribuer à une plus grande souplesse d’intégration de l’usine dans son environnement.
5. Forme architecturale
Il ne nous paraît pas aberrant d’affirmer ou de donner à voir la présence d’une structure de type industriel dans le paysage urbain, bien au contraire, dès lors qu’on ne tombe pas dans la caricature. S’il est assumé et s’accompagne d’une réflexion architecturale approdondie, ce parti pris peut naturellement générer de la diversité dans le paysage urbain. Dans ce sens, l’érection, par exemple, d’une cheminée architecturée pouvant devenir un belvédère (projet BERIM), peut constituer une valeur ajoutée du projet d’usine. Si celle-ci peut en plus contribuer à réduire encore plus fortement et à moindre coût l’impact des fumées, alors pourquoi s’en priver ?
6. Végétalisation
Les propositions de terrasses et de toitures vegétalisées abondent notamment dans le projet BERIM, qui en fait son axe architectural. Si nous y prétons un intérêt certain, nombre d’exemples à Paris rive gauche montrent la difficulté de faire pousser des arbres, qui plus est dans peu de terre, dans une zone fortement ventée. L’impact des vents pourrait même être augmenté à l’avenir par de nouveaux alignements de bâtiments ou des bâtiments de grande hauteur. Squelettiques, les séquoias de l’avenue de France vont être remplacés. La « forêt » de la Bibliothèque nationale de France a dû être haubanée dès l’origine et les cimes de ses arbres sont couchées à angle droit. Il faut donc être très prudent dans ce domaine et pousser les tests de faisabilité trés fortement pour se prémunir des « Bérézinas » possibles, en tenant compte de la particularité du lieu d’ímplantation : une usine produisant de la chaleur. Il serait souhaitable que des tests soient lancés dès aujourd´hui in situ, pour ne éviter que l’identité visuelle et architecturale du projet futur ne repose sur un concept de végétalisation qui se révélerait irréalisable.
7. CPCU de secours
Le groupement BERIM propose, à des fins de mutalisation, de rapatrier sur le site SYCTOM l’usine CPCU de secours située à l’extrémité opposée de la commune d’Ivry. Une telle option devrait faire l’objet dès à présent d’une étude préalable à la phase du débat public, afin d’en mesurer la pertinence et d’intégrer si nécessaire cet élément nouveau dans le dossier mis en débat.
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28 mai 2008
Remarques sur le prolongement
de la ligne de Tramway T3 notamment
dans le secteur de la Porte de Vitry à la Seine
(Note à l’intention de la Commission d’enquête publique, 28 mai 2008)
Le projet d’extension de la ligne de tramway T3 doit être amélioré sur deux points principaux :
- révision du positionnement de la ligne sur la chaussée, qui varie trop au fil du parcours en créant des zig–zags pour les automobilistes et un imbroglio de panneaux routiers impactant négativement la sécurité des piétons ;
- concevoir un dispositif cyclable qui prenne plus en compte l’engouement pour ce mode de déplacement chez les Parisiens et les touristes, en particulier depuis la création du Velib’, en supprimant où limitant les trop nombreuses discontinuités des voies dédiées.
Par ailleurs afin de répondre aux besoins légitimes de mobilité des franciliens, nous souhaitons que soit réalisé l’extension du tramway T3 jusqu’à la Porte d’Asnières et son prolongement jusqu’à la Place de la Nation (pour permettre l’ínterconnexion avec la ligne A du RER et les lignes 2 et 6 du métro) -dans le cas ou la rupture de charge entre les deux « arcs » d’exploitation, prévue cours de Vincennes, serait maintenue.
DEMANDE GÉNÉRALE
1. Que soit mises en place sur chaque trottoir et aux rond–points des pistes cyclables continues à double sens facilitant une pratique locale du vélo (pas de traversées de chaussée) et rendant les déplacements en vélo plus aisés et plus sûrs.
PORTE DE VITRY
2. Nous sommes favorables à la suppression de l’autopont pour implanter la station de tramway Porte de Vitry, redonnant à cette porte un visage plus urbain.
Une attention particulière doit être porté au traitement du nouveau pont de la Petite ceinture, rue de Patay pour conserver son caractère ferroviaire à l’ouvrage (utilisation du métal plutôt que le béton).
PORTE DE FRANCE
3. Entre les deux branches de l’avenue de France, la capacité de la station située côté intérieur nous semble sous dimensionnée (2 quais de 5 mètres de long en vis-à-vis) pour accueillir les pointes de fort trafic de voyageurs dans ce secteur, dédié en grande partie au tertiaire. Un élargissement de ces quais s’impose.
4. De grandes aires de parking vélos doivent être crées á proximité de la station.
5. L’obligation faite aux cyclistes venant de la Porte de Vitry de traverser toute la chaussée pour poursuivre leur route – côté intérieur – en direction de Charenton, constitue un point noir du projet, occasionnant une perte de temps et pouvant susciter des encombrements. Un dispositif de feux donnant la priorité aux vélos doit être installé pour pallier cette rupture de continuité de la piste cyclable.
PORTE DE LA GARE
6. Il faut programmer une station Porte de la gare dès la première phase de travaux actuellement soumise à enquête publique. Côté intérieur, ce secteur de Paris rive gauche est presque en totalité construit et accueille notamment une forte population d´étudiants. De l’autre côté – entre le boulevard Masséna et le périphérique – se dessine un futur grand projet urbain dont certains programmes pourraient naître autour de 2012. La programmation de la station Porte de la Gare dès la première phase du chantier est un élément déterminant pour dynamiser cette opération urbaine de grande ampleur et favoriser l’installation des activités et logements prévus. Cette station est en outre absolument nécessaire pour renforcer les liens entre Paris et sa proche banlieue. Nous demandons que soit mise à l’étude la réalisation de cette gare pour une ouverture en 2012.
TRAFIC
7. L’idée selon laquelle la distance réduite entre la Porte de la Gare et la Porte de France affaiblira la vitesse commerciale de la ligne n’est pas prouvée. Paris rive gauche va drainer une forte population d’employées de bureau et d’étudiants notamment. Disposer de deux stations rapprochées permet au contraire de répartir ce flot sur deux sites, ce qui permettrait par exemple de pouvoir réduire le temps de stationnement des rames à quai. Des accès à chaque extrémité des quais doivent être aménagés tout en préservant la sécurité des voyageurs. Un parcours piéton sécurisé peut diriger les voyageurs vers des passages piétons plus éloignés. Les retards de trafic des moyens de transports en communs sont en général dus à des pannes de fonctionnement et des incidents passagers difficilement contrôlable. C’est au regard de ces éléments imprévisibles mais malheureusement relativement courants qu’il est bon de juger l’écartement entre la Porte de la Gare et la Porte de France. Optimiser la bonne répartition spatiale des deux stations de tram sur Paris rive gauche doit faire l’objet de séances de concertation entre concepteurs et futurs usagers.
8. De plus la latitude spatiale au niveau de la fourche de l’avenue de France peut aussi permettre d’espacer les voies de tram pour accueillir un quai central à la station Porte de France, permettant ainsi de fluidifier encore plus les montées et descentes des voyageurs et réduire d’autant le temps en station.
ENJEUX URBAINS
Le secteur Masséna-Bruneseau est au coeur des préoccupations urbanistique liées à une qualité environnementale de ville moderne. Réaliser la Porte de la Gare avant que ne soit construit en totalité ce secteur est la meilleure façon d’anticiper l’édification du quartier novateur du 21ème siècle, si cher à Paris. A l’inverse, c’est, toute proportion gardée, ce dont ont souffert les projets de villes nouvelles dans les années 70 : l’absence d’anticipation des moyens de transports urbains à auteur des besoins. Prendre les devants, en innervant ce site d’une station de tramway, est dans la droite ligne d’un aménagement de type développement durable emblème affiché de Paris rive gauche. Réaliser cette gare en amont du projet urbain est une question de bonne gestion urbaine.
PORTE DE FRANCE DÉPORTÉE COTÉ SEINE ET SUPPRESSION DE LA PORTE DE LA GARE
9. Il faut mettre à l’étude une implantation de la station Porte de France à cheval sur la branche coté Seine. La relative proximité de la Porte de la Gare vis à vis de la Porte de France -tel que prévu dans le projet- fait craindre par certains une possible baisse de vitesse commerciale du tramway. Repenser l’implantation de la Porte de France plus à l’est avec 2 quais décalés (par exemple) est une alternative crédible permettant de relier convenablement les deux secteurs de Paris rive gauche et de faire des économies (une gare au lieu de deux). La non réalisation de la Porte de la Gare peut se concevoir notamment si le futur Tram Val de Seine se connecte avec le tramway T3 au niveau de l’avenue de France. Cette option doit être un élément comparatif à mettre en débat avant tout choix définitif. Elle peut permettre a contrario de rendre pertinent le choix proposé et évident la nécessité de lancer la mise en service de la Porte de la Gare pour 2012.
CONCERTATION AVEC SEINE AMONT
10. Une concertation approfondie avec tous les acteurs concernés par l’aménagement de cette porte de Paris doit être lancée après la clôture de l’enquête publique. Le projet de tramway Val de Seine notamment et celui du tramway T3 doivent pouvoir être débattus dans une même instance afin de rechercher la meilleure adéquation possible. Il n’est pas certain que tout ait été fait dans ce domaine, lors de la phase d’élaboration de l’extension du T3. Le projet urbain sur ce secteur étant en débat il est nécessaire de mettre en place un outil de concertation (gestion participative des services publics locaux) à l’échelle intercommunale, comme le préconise le Ministère de l’Écologie.
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avril 2008
“Adieu aux panaches blancs !”
Les conditions d’intégration dans son environnement de l’usine de traitement des déchets d’Ivry/Paris XIII, en cours de reconfiguration, sont au cœur des débats du comité de pilotage auquel l’association TAM-TAM participe.
Avec les deux panaches de fumées blanches qui s’échappent de ses cheminées, l’usine Syctom (Syndicat intercommunal de traitement des ordures ménagères de l’agglomération parisienne) située dans le secteur Masséna-Bruneseau est familière aux habitants et usagers de Paris rive gauche. Silhouette surprenante à la porte de Paris, elle intrigue par ses dimensions, son aspect et sa proximité avec le tissu urbain des alentours, au point que d’aucuns la verraient mieux en rase campagne. Cette usine d’incinération et de valorisation des déchets ménagers du bassin sud-est de l’agglomération parisienne, qui comprend un centre de tri des collectes sélectives, une déchetterie, un garages à bennes et une unité de valorisation énergétique produisant de la chaleur pour le chauffage urbain (CPCU), joue pourtant un rôle majeur. Mais, construite en 1969 et modernisée en 1995, elle est aujourd’hui en fin de vie.
Diverses consultations, un débat public avec la population d’Ivry et des études menées par le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) et l’Observatoire régional des déchets d’Île de France (Ordif), notamment sur l’hypothèse d’une délocalisation, ont débouché en avril 2007 sur une démarche visant à la construction d’une nouvelle usine en lieu et place de l’usine actuelle. Un marché public de prestations intellectuelles vise à définir les meilleurs scénarii pour l’optimisation et l’intégration de ce nouveau centre de valorisation biologique et énergétique à l’horizon 2015. Son comité de pilotage auquel l’association TAM-TAM participe aux côtés d’élus de Paris et d’Ívry, des responsables du Syctom, de représentants de l’État, du Conseil général du Val de Marne, de la région Ile de France, de la SEMAPA, de l’Atelier parisien d’urbanisme, des membres du Comité scientifique de la Ville d’Ivry et d’experts, a déjà tenu trois réunions. Le19 octobre, il examinera les rapports finaux de trois équipes mandatées et, si le choix d’implantation est validé, le Syctom pourra affiner le cahier des charges et lancer la phase de construction.
Intégration urbaine
Pour répondre aux critères environnementaux en vigueur et contribuer à la diminution des gaz à effet de serre, le programme des études de faisabilité de ce nouveau Centre de valorisation biologique et énergétique d’Ivry-Paris XIII fixe une série d’objectifs. Il s’agit d’une réduction de 20% des capacités de traitement des déchets entrant sur le site (600 000 t/an environ) ; du tri mécanisé des ordures ménagères à l’arrivée sur le site ; de la diminution de moitié de la capacité d’incinération pour la fraction incinérable après tri (actuellement environ 350 000 t/an) ; du traitement par méthanisation de tout ou partie de la fraction humide des ordures (250 000 t/an) avec production d’énergie ; du maintien des capacités de production énergétique sous forme de vapeur pour le chauffage et l’alimentation en eau chaude de 100 000 logements (CPCU) ; de la suppression des panaches de fumée par l’intégration architecturale des cheminées et du bâtiment ; ainsi que du développement du transport fluvial des produits sortants par la création d’un accès direct à la Seine, et de l’accessibilité au faisceau ferroviaire.
Ces transformations devraient avoir un impact positif en termes d´efficience énergétique, de recours aux modes de transports alternatifs (fluviaux et ferroviaires) et d’intégration urbaine. La connexion de la voirie entre Paris et Ivry, au cœur de la réflexion sur l’aménagement du secteur, pose cependant des problèmes : le débouché de l’avenue de France, via la rue Bruneseau, vers la rue Molière rencontre sur Ivry le difficile croisement avec la rue Victor Hugo, qui enjambe les voies ferrées en créant une différence de niveaux des rues très contraignante pour la circulation. La question d’une rue publique traversant le cœur de l’usine fait aussi débat. Enfin, le déplacement de la cimenterie Calcia à proximité de l’entrée actuelle du Syctom, rue Bruneseau, en connexion avec le réseau ferré, constitue une autre source de complications pour la circulation automobile.
Les conclusions des études engagées devraient permettre d’évaluer les nouvelles dimensions de l’usine projetée. Compte tenu du surcoût d’un éventuel enfouissement de tout ou partie des installations, le débat final se concentrera dans une large mesure sur les efforts à consentir pour faire de l’intégration de l’usine dans son environnement une priorité, en réduisant sensiblement sa volumétrie. Un enjeu auquel TAM-TAM entend être particulièrement attentif.
Énergie solaire
En effet, pour l’usine d’Ivry/Paris XIII, le gigantisme n’est plus de mise alors que, sur le moyen et le long terme, un autre mode de chauffage urbain, à base d’énergie solaire, est appelé à se développer. Il serait bon que la réflexion à venir sur l’aménagement de Masséna-Bruneseau fixe l’objectif d’un secteur modèle sur le plan de la consommation énergétique, avec une architecture moins énergétivore, privilégiant le recours à l’énergie solaire dans les nouvelles constructions. Si tous les acteurs de ce débat l’envisagent désormais, la question d’une diminution du traitement par incinération pour alimenter en vapeur le CPCU pourrait être envisagée avec plus de lucidité, et le choix du solaire regardé avec plus de détermination comme une solution d’avenir incontournable. On pourra alors dire sans regret adieu aux panaches blancs.
[Tribune parue dans Paris rive gauche magazine en avril 2008]
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janvier 2008
“Des tours, pour quoi faire ?”
L’idée d’implanter une série de tours entre le boulevard Masséna et le Périphérique se trouve remise sur le tapis par la mairie de Paris. Mais cette dernière ne fait toujours pas la démonstration de leur utilité pour répondre aux défis posés par la nécessité de développer les liens urbains et sociaux entre Paris et Ivry et le long du boulevard Masséna.
Depuis le mois de novembre, la campagne pour la construction de tours dans trois secteurs de la capitale bat à nouveau son plein. Pour le quartier Masséna, les projets présentés par la mairie de Paris s’étagent de 120 à 210 mètres. Si l’on peut comprendre que s’expriment la volonté des promoteurs de développer des projets réputés lucratifs, et l’ambition des architectes et des responsables politiques de marquer le territoire parisien de fortes émergences, cette obsession très idéologique ne répond pas plus aujourd’hui qu’en 2002, lors du premier projet de l’architecte Yves Lion, aux défis de l’aménagement de cet espace charnière entre Paris et Ivry-sur-Seine.
Des arguments superficiels
Les arguments présentés en faveur de tours dans ce secteur apparaissent étrangement superficiels : Non, les tours telles qu’elles sont envisagées entre le boulevard Masséna et le boulevard périphérique n’augmenteront guère la densité urbaine. Au-delà de 14 étages, les obligations légales imposées aux « immeubles de grande hauteur » (IGH) limitent en leur sein la part des mètres carrés utiles au profit de mètres carrés dédiés aux installations de sécurité. En outre, dès lors que les pieds d’immeubles sont dégagés au lieu de constituer un tissu urbain continu, la densité se trouve réduite d’autant. Non, le dégagement de vastes espaces paysagers au pied des tours ne peut constituer, dans ce secteur situé en contrebas de l’imposant et bruyant viaduc du boulevard périphérique, une réponse aux besoins d’espaces verts. Et enfin non, ces tours ne sauraient répondre aux attentes des Parisiens en matière de logement. Les prix de revient et surtout les charges et les coûts d’entretien des IGH n’y favorisent pas l’installation de logements sociaux. Même sur la dalle des Olympiades, au cœur du 13e, où les tours sont composées d’appartements détenus par des particuliers, il a fallu piocher dans la poche du contribuable pour assurer les travaux de remise en état indispensables.
Favoriser le lien et la mixité sociale
Surtout, l’idée d’un paysage de tours à Masséna apparaît plaquée sur la réalité concrète du terrain. En remettant en cause sans la moindre concertation les acquis des débats de 2002, qui avaient débouché sur une remise en cause en profondeur du premier projet d’Yves Lion, elle fait fi des vrais enjeux de l’aménagement d’un des espaces où se jouent la qualité de la « couture urbaine » entre Paris et sa banlieue.
Relier Paris et Ivry d’une part, les quartiers très peuplés de Patay-Masséna et la Seine d’autre part, cela ne consiste pas à piquer un vaste no man’s land paysagé d’une théorie d’IGH bordés par les axes du boulevard de ceinture et du Périphérique. Il s’agit d’établir des continuités urbaines, en ouvrant de nouvelles voies et en les raccordant, et d’y favoriser le lien et la mixité sociales en y développant un programme ambitieux de logements, de bureaux, de commerces et d’activités tenant compte dans leur implantation des contraintes particulières du site. Cette stratégie est particulièrement nécessaire tout le long du boulevard Masséna, sur lequel circulera le tramway, avec la perspective de rapprocher les populations du 13e de la Seine et de celle du 12e.
Car dans le secteur de Bercy, également visé par un projet à IGH multiples, les options envisagées se révèlent aussi inadaptées. Certes, on ne peut espérer faire beaucoup progresser le lien urbain et social de Paris à Charenton entre les voies ferrées, le centre commercial de la porte de Bercy et le débouché de l’autoroute A4. En revanche, les conditions sont réunies pour aménager en continuité le boulevard Poniatowski, du cœur du 12e à la Seine, et donc pour créer de l’urbanité et de la socialité là où elles font défaut, entre la rue de Charenton (12e) et la rue de Patay (13e).
Pour ou contre des tours à Paris ? La question tient pour l’instant du trompe l’œil. Le vrai défi consiste à penser la modernité de la capitale dans l’invention de nouveaux rapports avec sa banlieue qui privilégient l’urbanité et la mixité sociale. Il y a du pain sur la planche.
[Tribune parue dans Paris rive gauche magazine en janvier 2008]
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